Beni, le 17 novembre 2025
C’est une division au sein de la commission Ad Hoc pour la clarification des limites légales du Parc National de Virunga (PNVi) en ville et territoire de Beni au Nord-Kivu à l’Est de la République Démocratique du Congo. 5 des membres de cette commission expriment leur indignation et profonde préoccupation face à ce qu’ils qualifient des irrégularités constatées lors des travaux de restitution du rapport de la sous-commission des experts techniques de la clarification des limites légales du Parc National de Virunga tenue en Beni du 03 au 04 novembre 2025. Ils se sont exprimés ainsi, dans une correspondance adressée au Gouverneur de province ce lundi 17 novembre 2025.
« Excellence, à en croire, tout au début cette commission chapeautée par le Procureur de la République jouait bien son rôle et à son tour elle a mis en place une sous-commission des experts pour le prélèvement des coordonnées qui devraient prendre la partie technique du rapport. Malheureusement, un des experts de l’ICCN, auteur des toutes mauvaise lecture, interprétation et matérialisation des limites légales sur terrain, a imposé ses résultats contestés de 2008 et 2015, qui lui donne une suprématie sur les autres membres dans cette sous-commission suite à la prise en charge financière par l’ICCN des toutes les activités y afférentes et a prétendu avoir une connaissance approfondie dans le dossier, d’où il a profité imposer son rythme de travail et les données collectés en 2008 et 2015 par l’ICCN qui créent confusion sur terrain jusqu’à nos jours. Cette façon de travailler à pousser à 2 experts indépendants sur 4 de se retirer pour ne pas endosser la responsabilité des conflits et vous induire en erreur. À ce qui précède, après audition du rapport technique élaboré par les 2 experts (ICCN-IGC) au détriment des deux autres qui se sont retirés en raison ci-haut évoquées, par expérience dans le dossier, nous constatons avec amertume la mauvaise foi qui persiste en présentant le résultat identique à celui de 2008 et 2015 fortement contestées par les chefs terriens et la population riveraine qui le qualifiera de plagiât et confirmera la suspicion d’un rapport préfabriqué longtemps dénoncé par la population suite au non-respect du moratoire par l’ICCN » indiquent ces cinq dans leur lettre de dénonciations au Gouverneur Militaire. Parmi ces révoltés un représentant de l’assemblée provinciale, des Chefs coutumiers, un défenseur judiciaire et un membre de la société, dont l’Honorable Élie Mbafumoja, Mwami Paluku Kalemire Abdoul, Mwami Bhalitusuka Saa-mbili Pascal, Maître Kakule Ngahangondi Moïse et Omar Kalisya Kasereka.
« En effet, le rapport exposé ne reflète nullement les conclusions objectives des travaux de terrain. Il apparaît plutôt comme une version unilatérale inspirée de l’Institut Congolais pour la Conservation de la Nature (ICCN), cherchant à légitimer des positions déjà contestées et juridiquement fragiles. Ce document reprend, presque intégralement, les données issues des travaux de 2008 et 2015 déjà rejetés pour non-conformité aux réalités locales, légales et historiques et s’appuie sur des cartes et procès-verbaux d’extension dépourvus de fondement juridique clair ou de validité officielle. Eu égard à ce qui précède, nous relevons que :
- Le rapport a été élaboré principalement à Goma, zone sous occupation du M23/RDF, et parachevé à Mutsora, siège de l’ICCN, en dehors du terrain d’étude et sans implication effective des autres membres de la commission;
- Le pré-rapport technique n’a jamais été communiqué aux membres de la Commission avant la séance de restitution, en violation des principes élémentaires de collégialité et de transparence, et ce jusqu’à présent.
- Les participants ont été appelés à valider un rapport qu’ils n’avaient lu ni débattu, sans examen préalable ni lecture approfondie, en méconnaissance du principe de participation et du droit à l’information;
- La sous-commission technique a été dominée par un expert de l’ICCN déjà impliqué dans les erreurs méthodologiques et cartographiques de 2008 et 2015, situation qui a conduit au retrait de deux experts indépendants refusant de cautionner un processus biaisé;
- Enfin, le moratoire provincial que vous aviez instruit n’a pas été respecté, l’ICCN ayant poursuivi sur le terrain des activités de destruction des cultures préexistantes et de marquage avant toute validation officielle, vidant ainsi la commission de sa raison d’être. le Ainsi, nous dénonçons également comportement inapproprié et dominateur du technicien principal de l’ICCN, dont l’attitude découle du fait que le processus a été entièrement financé par son institution. Ce financement, au lieu de garantir la neutralité des travaux, a instauré un déséquilibre manifeste, transformant la démarche en une opération à sens unique, où l’ICCN impose sa vision et ses intérêts. Ce technicien, principal rédacteur du rapport, s’est arrogé le droit de sélectionner uniquement les éléments confortant sa position, écartant toute observation contraire. Conscient du caractère partial de son travail, il s’est délibérément abstenu de le partager avec les autres membres de la Commission, craignant que ses incohérences et omissions ne soient mises en lumière. C’est pourquoi, nous sollicitons de votre Excellence:
- Que la reprise du processus se fasse sous la supervision d’un autre partenaire technique et financier, neutre et distinct de l’ICCN, afin de garantir l’indépendance méthodologique et la confiance mutuelle entre les parties;
- Que le pré-rapport et le rapport complet soient mis à la disposition de tous les membres de la Commission pour examen contradictoire et observations écrites avant toute validation;
- Que tous les documents de base relatifs à la création et à l’évolution du Parc National Albert (Virunga), décrets, actes de cession, conventions et autres pièces justificatives, soient transmis à la Commission, afin de Vérifier la régularité de la procédure d’acquisition initiale des terres; identifier groupement par groupement, les superficies effectivement cédées à l’État et déterminer la portion du territoire demeurant légèrement couvert par le Parc » ajoutent-ils.
Pour ces cinq membres, l’ICCN n’a aucune volonté de rechercher la paix durable entre le parc et la population riveraine, d’où la raison d’implorer l’implication de l’autorité provinciale pour débloquer ce processus et le travail de ladite commission AD HOC.
« Excellence Monsieur le Gouverneur, nous avons des raisons fondées de croire que ce rapport dit « technique » poursuit un objectif politique inavoué celui de neutraliser la Feuille de route de la Commission parlementaire de 2013 ainsi que les Recommandations de l’Assemblée Nationale du 11 janvier 2016, qui demeurent les légitimes références dans la recherche d’une solution durable aux différends opposant I’ICCN aux populations riveraines du Parc National des Virunga. Une orientation en sens unique conçue à l’ICCN risquerait de compromettre les acquis du dialogue ICCN-Population et de raviver des tensions déjà vives dans la région de Beni. Sans ces préalables essentiels, toute validation du rapport de ce genre serait prématurée, dénuée de base légale et contraire à la logique de transparence, de justice et de bonne gouvernance que vous avez toujours incarnée, Ainsi, tout rapport validé de la manière ci-haut décriée ne saurez nous engager et c’est pourquoi, nous nous remettons à la diligence de votre sagesse pour la suite y réservée. Enfin, nous réaffirmons néanmoins notre pleine disponibilité à poursuivre les travaux dans un cadre inclusif, loyal et respectueux de la vérité historique comme de la légalité » concluent-ils dans leur correspondance signée par cinq (5) des membres de la commission Ad Hoc pour la clarification des limites légales du Parc National de Virunga.
Rappelons que, cette commission aujourd’hui fractionnée, avait été mise en place par l’autorité provinciale via un arrêté Provincial nº 01/ES/062/CAB/GP-NK/2025 du 18 juillet 2025 portant création de la Commission Ad Hoc chargée de la clarification des limites légales du Parc National des Virunga (PNVi) en ville et territoire de Beni, c’était à l’occasion de la commémoration de 100 ans d’existence de ce patrimoine mondial, qui est au centre des tensions entre l’Institut Congolais pour la Conservation de la Nature (ICCN) et les populations riveraines du parc, depuis des années. Deux autres membres de ladites commission, avaient démissionné quelques jours après suite aux flous qui avaient émaillé tout au départ les travaux de cette dernière sur terrain.
Rédaction